Ce jour-là, Lise avait douze ans, et la pluie semblait décidée à se déverser sans fin sur Portiragnes. Le ciel gris déversait des trombes d’eau sur le village, transformant chaque ruelle en petit ruisseau et chaque caniveau en rivière boueuse. Mais pour Cathie, grand-mère et maîtresse incontestée de l’optimisme à toute épreuve, c’était une raison de plus pour mettre du piment dans la journée. Après tout, la pluie n’était qu’un léger détail, un « peu d’eau de rien du tout », disait-elle, bien enroulée dans son ciré jaune vif.
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Lise, elle, n’était pas aussi convaincue.
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— Grand-mère, tu es sûre que c’est une bonne idée ? demanda-t-elle, le nez collé à la fenêtre, regardant les trombes d’eau qui s’abattaient dehors.
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— Une bonne idée ? Non, ma chérie, c’est une idée géniale ! répondit Cathie en ajustant son chapeau de pluie. Allez, hop, enfile ton ciré ! On va à la plage.
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— À la plage ?! Mais il pleut des cordes ! Tu sais que ça veut dire qu’il y a beaucoup d’eau, non ? tenta Lise, en espérant une lueur de bon sens chez sa grand-mère.
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— Oh, Lise, arrête de réfléchir comme une adulte ! Ce n’est pas « beaucoup d’eau », c’est une aubaine ! Tu crois que les poissons dans la mer se plaignent ? Tu les entends dire : « Oh non, il pleut, je vais me mouiller » ? Non, ils nagent. Alors, on fait comme eux.
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Lise soupira en attrapant son ciré orange vif et ses bottes de pluie. Elle savait que discuter avec Cathie était aussi utile que d’essayer de convaincre le soleil de briller.
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En chemin vers la plage, elles sautèrent dans toutes les flaques d’eau qui croisaient leur route, sous les éclats de rire de Cathie.
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— Celle-là, elle est pour toi ! cria-t-elle en éclaboussant Lise avec une bonne dose d’eau boueuse.
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— Mamie ! Mais t’es pire qu’un gamin de cinq ans ! protesta Lise, faussement indignée.
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— Peut-être, mais un gamin de cinq ans heureux, ma petite ! Allez, venge-toi, je t’autorise une grosse éclaboussure.
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Lise éclata de rire et visa parfaitement les bottes de Cathie avec une flaque bien profonde.
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— Touché ! s’exclama-t-elle fièrement.
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Quand elles arrivèrent enfin à la plage, la mer était déchaînée. Les vagues roulaient et s’écrasaient avec une force impressionnante, et le vent s’engouffrait dans leurs capuches, rendant la scène encore plus épique.
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Cathie leva les bras au ciel, comme pour défier la tempête.
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— Regardez-moi ça ! Une mer en colère, des vagues qui rugissent… et nous, deux héroïnes intrépides prêtes à affronter l’ouragan !
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— C’est pas un ouragan, mamie. C’est juste une grosse averse, fit remarquer Lise en croisant les bras.
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— Eh bien, garde ça pour toi, Miss Météo ! Moi, je dis que c’est une aventure digne des plus grandes épopées. On pourrait écrire un livre : Lise et sa grand-mère dans la tempête de l’année !
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Lise secoua la tête, mais un sourire trahissait son amusement. Elle allait répondre quand elle aperçut, au loin, une silhouette qui se détachait sur le sable trempé. Une fille de son âge, pieds nus, avançait à grandes enjambées, l’air défiant les éléments. Ses cheveux bruns dégoulinants lui collaient au visage, mais elle semblait insensible à la pluie.
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— Eh bien, ma petite, tu n’es pas la seule à être aussi folle que moi, dit Cathie en désignant la fille d’un coup de tête.
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— Aussi folle que toi ? J’en doute, murmura Lise, mais Cathie l’entendit.
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— Oh, tu crois ? On va vérifier ça tout de suite ! Allez, viens, allons saluer cette jeune téméraire.
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— Mamie ! On ne parle pas aux gens comme ça, sous la pluie, sur une plage vide ! protesta Lise, déjà gênée.
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— Pourquoi pas ? Si elle est là, c’est qu’elle a l’esprit d’aventure, elle aussi. On va voir si elle a aussi de l’humour.
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Cathie s’approcha, sans se soucier des protestations de Lise, et héla la fille d’une voix forte.
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— Hé, toi, là-bas ! Belle journée pour une promenade, tu trouves pas ?!
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La fille se retourna, visiblement surprise, mais elle sourit en voyant les deux figures colorées dans leurs cirés orange et jaune. Elle attendit qu’elles se rapprochent, plantée fermement sur le sable.
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— Salut ! Moi, c’est Cathie, et voici Lise, ma petite-fille. On aime la pluie, et on dirait que toi aussi, non ?
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La fille haussa les épaules avec un sourire.
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— Salut. Moi, c’est Chloé. Je suis nouvelle ici… Et pour la pluie, disons que je n’ai pas eu trop le choix. Mes parents disent que c’est normal qu’il pleuve comme ça, mais je crois qu’ils se fichent de moi.
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Cathie éclata de rire.
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— Bienvenue à Portiragnes, Chloé ! Ici, on dit que la pluie, c’est comme le vin : ça fait partie du patrimoine, mais il faut apprendre à l’apprécier.
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Lise écarquilla les yeux.
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— Mamie, elle a douze ans, pas cinquante ! Tu compares la pluie à de l’alcool, vraiment ?
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— Eh bien, si ça te dérange, tu peux comparer ça au chocolat chaud ! C’est pareil : un truc qu’on déteste jeune et qu’on finit par aimer avec le temps.
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Chloé rit, et Cathie continua :
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— Alors, Chloé, qu’est-ce qui t’a poussé à venir défier la tempête comme ça ? Une mission secrète ? Tu cherches des trésors enfouis ?
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Chloé plissa les yeux, amusée.
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— Peut-être. Ou peut-être que je voulais juste voir si la mer ici est plus impressionnante qu’à Bordeaux, d’où je viens.
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— Ah, la mer de Bordeaux… pas mal, mais elle ne peut pas rivaliser avec nos vagues de Portiragnes ! déclara Cathie avec fierté. Bon, maintenant que tu es là, tu veux nous aider à chercher des poissons secrets ? On a une théorie selon laquelle ils préparent une rébellion sous-marine.
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Lise secoua la tête, mais Chloé éclata de rire.
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— D’accord, mais si je les trouve, je garde la prime.
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— Marché conclu, répliqua Cathie en lui tendant une main trempée.
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Cathie, toujours dans son rôle de complice, les encourageait depuis le bord de la plage, les bras croisés et un sourire attendri aux lèvres.
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— Allez, les filles ! Montrez à cette plage ce que vous avez dans le ventre ! Vous êtes des guerrières ou des sardines ? cria-t-elle par-dessus le bruit des vagues.
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Chloé éclata de rire et se tourna vers Lise.
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— Elle est sérieuse, ta grand-mère ? Sardines ? Vraiment ?
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— Très sérieuse, confirma Lise, faussement blasée. Et crois-moi, elle peut trouver pire.
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Cathie, piquée dans son amour propre, leva un doigt théâtral.
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— Attention, Lise ! Si tu me provoques, je pourrais te comparer à une huître mal réveillée.
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— Je préfère encore la sardine, mamie, merci ! répondit Lise en levant les yeux au ciel, un sourire aux lèvres.
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Les trois passèrent la journée sous la pluie, explorant la plage déserte comme des exploratrices de l’inutile mais du très joyeux. Chloé et Lise se découvraient des points communs, comme leur amour des bêtises et leur goût pour les choses simples. À un moment, Chloé, pieds nus dans le sable mouillé, fit mine de chercher quelque chose.
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— Qu’est-ce que tu fais ? demanda Lise, intriguée.
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— Je cherche des crabes ! répondit Chloé avec enthousiasme.
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Lise secoua la tête, sceptique.
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— Des crabes ? Avec ce vent et cette pluie ? Ils sont sûrement tous planqués dans leurs trous.
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Chloé se redressa, les mains sur les hanches.
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— Tu sous-estimes ma capacité à trouver des trucs improbables. Je suis la reine des crabes, moi !
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Cathie, qui écoutait à distance, intervint aussitôt :
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— Reine des crabes ? Mais quel titre prestigieux, Chloé ! Je vais te faire une couronne en algues, ça ira parfaitement avec ton look dégoulinant.
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Chloé rit de bon cœur et poursuivit ses recherches avec acharnement, mais les crabes refusèrent de coopérer.
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— Sérieusement, ils pourraient au moins dire bonjour, grogna-t-elle en revenant bredouille.
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— Peut-être qu’ils ont peur de la reine, lança Lise en haussant un sourcil. Ils se disent : “Oh non, elle revient pour nous imposer des taxes royales !”
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— Trop tard pour eux ! Dès que je trouve un crabe, il est promu chevalier, déclara Chloé en riant.
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— Pauvre crabe, murmura Lise, faussement compatissante.
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Quand la pluie se mit enfin à faiblir, Cathie, trempée mais rayonnante, leur fit signe de s’approcher.
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— Bon, mes petites sardines, on a gagné la bataille contre la tempête, mais il est temps de rentrer. Je vous propose un chocolat chaud bien mérité, avec des guimauves, bien sûr !
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— Des guimauves ? Tu ne fais pas les choses à moitié, mamie, remarqua Lise.
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— Jamais ! répondit Cathie avec un clin d’œil. Une vie sans guimauves, c’est comme une plage sans coquillages : triste et inutile.
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Chloé hocha la tête, comme si elle méditait une grande vérité.
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— Elle a raison. Une vie sans guimauves, c’est pas une vie.
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De retour chez Cathie, Chloé découvrit un véritable refuge. La maison sentait toujours bon le savon de Marseille et la tisane, et le salon, avec ses coussins moelleux et ses tapis colorés, semblait prêt à accueillir une armée de pirates fatigués. Cathie leur tendit des serviettes épaisses en les guidant vers la cheminée.
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— Allez, enlevez-moi ces cirés dégoulinants et installez-vous. Je m’occupe du chocolat chaud.
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— Avec les guimauves, hein ? insista Chloé en s’asseyant.
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Cathie lui lança un regard faussement outré.
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— Mais bien sûr ! Tu crois que je suis une amateur ? Je vais même ajouter une pincée de cannelle, parce que je suis une artiste.
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— Une artiste de quoi ? demanda Lise, sceptique.
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— Une artiste du bonheur, répliqua Cathie, la main sur le cœur.
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Chloé gloussa et murmura à Lise.
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— Sérieux, ta grand-mère, elle est trop cool. Je veux la même.
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— Trop tard, c’est la mienne, répondit Lise avec un sourire malicieux.
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Quelques minutes plus tard, elles s’enroulèrent dans des serviettes moelleuses et attrapèrent leurs tasses fumantes. Le chocolat chaud était une œuvre d’art, avec une montagne de guimauves fondantes et une pincée de cacao saupoudrée sur le dessus.
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— Alors, mes pirates, prêtes pour une dernière mission ? lança Cathie en déposant son propre bol sur la table.
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— Une mission ? fit Lise, méfiante.
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— Oui ! Dessinez-vous des moustaches avec la mousse de chocolat. Si on est des pirates, il faut au moins avoir l’air crédible.
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— Mais mamie ! protesta Lise, mi-choquée, mi-amusée.
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— Pas de “mais mamie”. Un pirate sans moustache, c’est comme un chocolat chaud sans guimauves. On en a déjà parlé.
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Chloé, morte de rire, plongea son doigt dans sa tasse et traça deux moustaches chocolatées sur sa lèvre supérieure.
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— Voilà, Capitaine Cathie. Je suis prête !
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Lise éclata de rire et suivit le mouvement, traçant des moustaches un peu bancales sur son propre visage.
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Cathie les observa avec un sourire satisfait.
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— Voilà ce que j’appelle des pirates du sud ! Vous êtes magnifiques, les filles. Bon, maintenant, qui veut un deuxième chocolat ?
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Ce jour-là, une amitié était née, une de celles qu’on ne voit venir qu’en de rares occasions et qui ne se rompent jamais. Lise savait qu’elle avait trouvé en Chloé une complice, une partenaire de bêtises, quelqu’un avec qui partager toutes les folies que sa grand-mère inspirait. Et pour Cathie, les voir ensemble, trempées, hilares, avec des moustaches de chocolat, était la plus belle récompense de sa propre jeunesse.
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Les deux amies passèrent de nombreuses autres journées ensemble, mais cette première aventure sous la pluie, avec des bottes pleines de sable et des cheveux collés par l’eau salée, restera pour toujours leur premier “grand coup” ensemble.
