Je reste bouche bée face à ces révélations. Ne sachant quoi répondre ou comment réagir, je m'inquiète de la suite de la conversation. J'attends silencieusement que Gabriel poursuive, mais ce dernier n'ajoute rien. Après quelques longues minutes, je sens mon matelas s'affaisser et aperçois Gabriel se faufiler à mes côtés.
– Ce que je veux dire, reprend Gabriel, c'est que j'aimerais recommencer. Maintenant, puis encore, et encore, parce que je crois que je t'apprécie vraiment. Et je n'arrive pas à penser à autre chose. Je sais que c'est à cause de ça que tu m'ignores depuis plusieurs jours, j'aurais dû t'en parler directement, j'ai été bête.
En apnée, je n'arrive pas à croire ce qui est en train de se passer.
– Tu crois que tu m'apprécies, je lui réponds. Comment peux-tu en être sûr ?
En guise de réponse, Gabriel mets ses doigts sur ma joue pour que je tourne mon visage dans sa direction et pose délicatement ses lèvres sur les miennes pour un baiser léger. Lorsqu'il s'écarte légèrement, je perçois dans l'obscurité son regard plein de désir. Cette fois-ci, je plonge sur les lèvres tendres que mon ami me tend. En l'embrassant, je redécouvre l'émotion qui m'a submergé la première fois, différente de celle ressentie avec Andrea. Je la sens plus franche, plus crue. Mon corps entier réclame la tendresse de Gabriel. Lorsque ce dernier se recule légèrement pour reprendre son souffle, je ne peux retenir un large sourire. Je me sens soudainement si léger et de doux frissons me parcourent la colonne vertébrale. Pendant qu'il me caresse délicatement la joue, Gabriel me rend mon sourire.
– Je croyais que je ne te plaisais pas, dit Gabriel.
Je ris et l'embrasse à nouveau.
– Ne dis pas de bêtise, j'ai dit ça parce que je suis grincheux. Mais bien sûr que je craque pour tes yeux.
– Oh ! C'est pourtant moi qui devrais dire ça. Tes yeux sont tellement beaux. Et quand tu mets du crayon noir autour, j'ai l'impression d'être face à un rockeur. Encore plus quand tu chantes !
Je ne sais trop où me mettre et quoi répondre à tous ces compliments, alors je l'embrasse délicatement sur les pommettes, puis la mâchoire et enfin, dans le cou où il m’invite en penchant la tête, y découvrant un léger parfum sucré, sûrement celui de son gel douche. Cette odeur m'apporte immédiatement une sensation d'apaisement dans la poitrine, comme si j'étais en sécurité. J'enroule mes bras autour de Gabriel et le fais basculer contre mon torse.
– Désolé de t'avoir mis à l'écart, dis-je en caressant son dos du bout des doigts. Disons que je n'ai pas de très bonnes expériences dans tout ce qui est de la gestion de l'après-baiser. J'ai honnêtement sacrément flippé.
Je sens Gabriel rire contre mon torse, y diffusant des ondes de frissons de plus en plus agréables.
– Ne t'excuse pas. J'aurais dû assumer, mais je pensais très franchement que tu ne m'appréciais pas comme ça. Même si, bon, notre baiser m'a quand même laissé penser que peut-être je t'attirais un petit peu. Je suppose que j'avais besoin d'un peu de temps pour comprendre tout ça.
Je resserre mon étreinte autour de Gabriel, comme pour bien vérifier qu'il est dans mes bras et souris dans le noir. En l'entendant bailler bruyamment, je murmure un « bonne nuit » et me laisse basculer dans les bras de Morphée.
Je me réveille brusquement, le cœur battant à tout rompre. Je me concentre difficilement sur les rayons de lumière qui traversent les volets pour essayer de calmer la vague d'angoisse qui semble m'attaquer. Lorsque j'arrive enfin à reprendre mes esprits, je compte mes respirations pour me calmer définitivement. Je me réveille d'un cauchemar étrange dans lequel je me voyais dans ce qui semblait être une salle de bain, entièrement nu, enfermé à clef sans aucune possibilité de sortir. Des chuchotements dont je ne pouvais déchiffrer les mots ont envahi mon esprit pour finalement laisser place à un bruit de respiration profonde, rauque et tremblante, associé à un ressenti d'oppression et de terreur, si bien que je ne pouvais plus bouger d'un poil. C'est à ce moment que je me suis réveillé, à moitié en sursaut, et ai évité de peu la crise d'angoisse.
Dans mon agitation, j'ai oublié que Gabriel dormait près de moi. En observant son visage apaisé, je pense à ce qu'il m'a dit pendant la nuit. J'ignore ce qui nous attend et crains qu’il m'abandonne comme Andrea l'a fait. Je refuse d'être une simple expérimentation, d'être traité comme si j'étais important et chéri pour ensuite être rejeté.
En contemplant le visage paisible de Gabriel, j'essaye d'orienter mes pensées vers des idées plus agréables, m'ancrant dans le présent, bien plus plaisant que mes pensées angoissantes. Au bout de plusieurs minutes, voyant que Gabriel ne se réveille pas, je me risque à regarder mon téléphone. Je vois plusieurs appels manqués de ma tante, mais rien de mes parents, preuve qu'ils s'en fichent bien d'où je peux être. J'envoie un message à Lucía pour la prévenir que tout va bien, sans donner d'information sur l'endroit où je me trouve, de peur qu'on vienne me chercher.
Commençant à avoir la bougeotte, je me lève et me rends dans la cuisine, décidé à préparer un bon petit déjeuner. En fouillant dans les placards, je trouve de quoi faire des pancakes et du chocolat chaud. Une quarantaine de minutes plus tard, je remonte dans la chambre avec une assiette remplie. Je constate en entrant que Gabriel s'est réveillé et se tient dos à moi, regardant par la fenêtre. Je profite qu’il ne se soit pas aperçu de ma présence pour le contempler. Les muscles de son dos sont joliment dessinés et sa peau appelle mes caresses.
– Je ne sais pas pour toi, mais moi j'adore la vue, dis-je en me rapprochant de lui.
Je dépose le plateau du petit déjeuner sur le bureau et m'arrête juste derrière mon ami. Ce dernier se retourne en souriant.
– Bonjour, dit-il avant de déposer sa bouche sur le coin de mes lèvres.
Je lui rends son baiser et le dirige vers le lit pour lui apporter le petit déjeuner. Alors que nous savourons les pancakes et les boissons chaudes, Gabriel dépose de temps en temps sa main sur ma jambe, y dessinant des petits cercles du bout de ses doigts, envoyant des ondes de plaisir dans mon corps entier. Je me fige à chaque sensation, de peur que tout s'arrête. Je ressens comme une urgence dès que mon ami me montre des gestes d'affection. Comme si ces moments que nous partageons me seront volés d'un moment à l'autre. Et, plus que tout, je me sens comme un imposteur, comme si je n'avais pas droit à cette tendresse. À chaque baiser, j'entends une voix murmurer que je ne mérite pas de recevoir ne serait-ce qu'une légère preuve d'affection.
– À quoi tu penses ? chuchote Gabriel en prenant ma main dans la sienne.
Je reste silencieux quelques secondes, regardant le pouce qui me caresse le dos de la main.
– À rien, tout va bien, je réponds, essayant au passage de me rassurer moi-même.
Après avoir débarrassé et fait la vaisselle, nous nous installons sur le canapé.
– Que veux-tu faire aujourd'hui ? demande Gabriel.
– Je ne sais pas, je pense qu'il va falloir que je rentre. Ma tante m'a dit que mes parents et Claude sont partis. Apparemment, on garde la maison jusqu'en janvier.
– Oh... Tu peux rester encore un peu ici si tu veux. Enfin, je ne veux pas te forcer non plus.
Je souris et embrasse Gabriel sur la joue.
– Je veux passer du temps avec toi, ne t'en fais pas. Mais je ne veux pas qu'on précipite les choses. C'est assez neuf, tout ça, pour moi. Et je suppose que ça l'est aussi pour toi. J'aimerais qu'on apprenne à réellement se connaître, tous les deux. J'ai... C'est difficile pour moi, ces histoires de donner sa confiance.
Gabriel hoche la tête et me regarde d'un air rassurant.
– Ça me va, je comprends. Je te propose de prendre une douche avant que je te raccompagne à l'arrêt de bus. On pourra ensuite profiter des vacances pour que je te raconte ma vie et que tu finisses par ne plus supporter ma voix.
Je ris et me lève pour aller me préparer.
Lorsque je suis de retour chez moi, ma tante est déjà partie au travail. L'atmosphère est lourde, comme chargée d'une tension qui imprègne les murs. Je m'assieds au bord de la piscine qui est maintenant couverte pour l'hiver, et repense à tout ce qui s'est passé la veille. Un frisson me parcourt lorsque je revois le regard que Claude m'a lancé quand mes parents ont mentionné le fait que je vivrai chez lui. J'y ai perçu une lueur presque perverse, comme si ses yeux me disaient « ça y est, je te tiens, j'ai gagné ». Je secoue la tête pour chasser l'inconfort qui s'empare de moi et rentre dans la maison. Ma tante m'a laissé de quoi me préparer un repas, mais à la simple idée de manger, je sens ma gorge se resserrer. Je me résous finalement à monter dans ma chambre pour jouer un peu de guitare. Cela fait un moment que je n'ai rien posté sur ma chaîne YouTube et ça me déplait. J'improvise une mélodie, laissant mes doigts courir sur le manche de l'instrument en fermant les yeux. Je retrouve dans la musique un refuge. Comme si cette bulle mélodieuse m'entourait pour me protéger en m'isoler du reste. Lorsque je joue de la guitare ou que je chante, mes pensées se calment et je sens mes émotions se fluidifier. La colère, la peur et la tristesse ressenties la veille sortent de mon esprit sous la forme de larmes éparses, coulant le long de mes joues.
Lorsque je pose ma guitare et referme les yeux, j'entends la respiration lourde, presque haletante qui m'a hanté la nuit dernière. Je m'empresse d'ouvrir les yeux, regardant tout autour de moi pour voir ce qui pourrait être à l'origine du bruit. Ne voyant rien, je secoue la tête d'un air perturbé. Serais-je en train de perdre la tête ? L'impression d'être observé me colle à la peau le reste de la journée. Quoique je fasse, j'ai la nette impression que quelqu'un se tient derrière moi et souffle dans mon cou. Le soir, alors que ma tante est de retour, j'essaye de manger ce qu'elle a préparé. Mais la simple idée d'avaler quelque chose me dégoûte et me serre la gorge. Prétextant avoir déjeuné tard, je mets mon assiette au réfrigérateur et remonte dans ma chambre. Une fois assis sur mon lit, je sens à nouveau ce souffle dans mon cou. Je ferme les yeux, essayant de me concentrer sur le souvenir du premier baiser échangé avec Gabriel, mais dès que je me rappelle la sensation des mains de mon ami sur mon corps, le bruit de la respiration haletante fait son retour dans mon esprit. Ne supportant plus ces hallucinations, je me saisis de mon téléphone et de mon casque, enfile mes chaussures et un pull, et sors de la maison. Je marche une bonne heure, jusqu'au centre-ville. La marche et la musique tiennent les pensées désagréables à distance, mais je les sens somnoler dans un coin de mon esprit. Souhaitant me maintenir occupé, je propose à Sara et Noée de me rejoindre. À leur demande, j'envoie également un message à Gabriel.
« On n'est pas obligés de leur dire ce qu'il y a entre nous, je te propose que ça reste notre secret pour le moment » j'ajoute à la fin de mon message.
Je n'ai pas peur de l'avis que porteraient mes amies sur notre relation. Au contraire, je suis persuadé qu'elles seraient ravies. Mais l'idée d'officialiser quelque chose m'effraie. Je crains qu'en concrétisant cette relation, les choses m'échappent et que je me retrouve à nouveau seul et abandonné. Mes trois amis arrivent en même temps. Alors qu'il commence à pleuvoir, Noée propose que nous nous rendions au cinéma pour voir le dernier film romantique sorti. Je fais une moue désapprobatrice mais finis par accepter la proposition face aux supplications de mon amie.
Une fois dans la salle de cinéma, je me retrouve assis entre Sara et Gabriel. Ce dernier m'adresse un sourire complice en caressant légèrement ma main de son doigt. Je lui souris en retour, savourant le frisson agréable qui me parcoure l'échine, et, alors que la salle se plonge dans le noir, j'enroule mon petit doigt autour de celui de Gabriel.
Comme je m'y attendais, le film n'est pas bien original. Il met en scène une histoire d'amour hétérosexuelle classique avec le même fil conducteur que toutes les autres. J'essaye néanmoins d'en apprécier les musiques qui semblent assez bien choisies. Alors que je somnole à moitié, je vois se jouer à l'écran une scène sexuelle. Je déteste ces scènes. Elles sont souvent filmées bizarrement et me mettent extrêmement mal à l'aise. Cependant, je ressens cette fois-ci une gêne plus forte qu'habituellement. Alors que j'entends le son des souffles et des gémissements qui se mélangent, je sens mon estomac se serrer et vois des tâches apparaître dans mon champ de vision. Lorsque des sueurs froides se joignent à l'étourdissement, sensation que je ne connais que trop bien, je me lève soudainement et tente tant bien que mal de sortir au plus vite de la salle. Je me précipite aux toilettes et vomis dans les premières qui sont ouvertes. Alors que mon estomac se vide, j'entends toujours l'écho des respirations fortes dans mon esprit, amplifiant la nausée. Au bout de quelques minutes, j'entends quelqu'un entrer.
– Tout va bien Matéo ?
Je reconnais la voix de Gabriel. Je m'essuie la bouche, tire la chasse et sors des toilettes.
– Je pense que j'ai mangé quelque chose de pas très frais, mais ça va mieux, dis-je avant de me rincer la bouche au robinet.
Gabriel me caresse légèrement le dos.
– T'es sûr que ça va ?
Je hoche la tête et entraîne mon ami vers la salle de projection. Nous nous asseyons et je ferme les yeux pour le reste du film, plongeant dans un demi sommeil. La musique du générique final me sort de ma sieste. Je me sens mieux et suis prêt à sortir faire la fête avec mes amis. Lorsque je leur partage mon envie, Sara et Noée acquiescent avec enthousiasme. Gabriel, lui, se montre un peu plus sur la réserve.
– T'es sûr que tu te sens mieux ? me demande-t-il. Tu ne veux pas plutôt qu'on se fasse un dîner tous les quatre chez moi ?
– Mais non ne t'en fais pas, tout va bien ! En plus, on est en vacances, il faut en profiter !
– Bon, ok, comme tu veux.
Nous nous arrêtons au fast food pour dîner. Voyant que je n'ai commandé qu'un soda, Gabriel me lance un regard inquiet.
– Je vais éviter d'être malade une deuxième fois, je me justifie.
Nous nous rendons ensuite dans un bar qui se transforme en piste de danse après vingt-trois heures. Lorsque nous arrivons, la fête bat son plein et les gens se déhanchent sur des musiques des années 80. Je saisis aussitôt la main de Noée et l'attire sur la piste de danse.
Après une heure passée à sauter et danser, je pars m'asseoir au comptoir pour souffler. Bien que l'activité soit distrayante, je n'arrive pas à me défaire du sentiment d'angoisse et d'oppression qui m'a saisi au cinéma. La proximité des gens qui se dandinent près de moi n'aide pas. Et chaque fois que je ferme les yeux, j'entends à nouveau ce souffle qui me hérisse les poils. Exaspéré et démuni, j'engloutis rapidement la pinte de bière que j'ai commandée quelques minutes plus tôt. Alors que je m'apprête à retourner danser, je vois Gabriel venir vers moi.
– Comment tu te sens ?, me demande-t-il.
Je hausse les épaules et fixe le fond de mon verre. Son inquiétude que je trouvais mignonne au début commence à m'irriter. Je frissonne néanmoins lorsque Gabriel pose sa main sur la mienne.
– J'aimerais rentrer, me dit-il. Tu viens dormir chez moi ?
– Je te propose qu'on boive un verre et puis qu'on aille plutôt chez moi, je lui réponds.
Gabriel approuve et me laisse lui commander à boire. Je descends ma boisson aussi vite que la précédente et regarde avec amusement mon ami essayer de me rattraper. L'alcool commence à me monter à la tête et je me sens enfin plus léger. Mes pensées se brouillent et l'angoisse me quitte. Alors que Gabriel annonce notre départ à Sara et Noée, je perçois chez mes amies un regard plein de sous-entendus.
– Amusez-vous bien, dit Sara en souriant malicieusement.
En m'éloignant, j’entend des gloussements venir de mes amies et je ne peux m'empêcher de sourire, moi aussi. Lorsque nous nous trouvons éloignés du centre-ville, je m'arrête et attire Gabriel contre moi. Mon esprit s'est allégé et les pensées étouffantes ont laissé place à des idées plus attrayantes. Je dépose délicatement mes lèvres sur son cou et, percevant le désir dans ses yeux, je lui caresse le coin de la bouche du bout des doigts.
– Embrasse-moi, chuchote Gabriel.
Je ne me fais pas prier et dépose mes lèvres contre les siennes. Ce dernier ouvre légèrement la bouche, approfondissant le baiser. Sentant ses mains se glisser sous ma veste, je frissonne et me fige pour apprécier les caresses. Alors que Gabriel s'écarte légèrement pour reprendre son souffle, j'observe les traits de son visage de plus près, les retraçant du bout des doigts. Il ferme les yeux un instant, puis m'entoure de ses bras pour m'attirer dans son étreinte. Au bout de quelques minutes, nous nous décidons à nous remettre en route, l'air froid de l'automne nous faisant frissonner. En arrivant chez moi, j'attire Gabriel dans ma chambre. Je me débarrasse de mon pantalon et enfile un t-shirt pour la nuit. Gabriel prend celui que je lui propose et s'allonge à mes côtés.
– Tu sais, je crois que les filles ont grillé qu'il se passe quelque chose entre nous, dis-je en caressant le bras de mon ami.
Ce dernier ne répond pas, mais je perçois de la crainte dans son regard.
– Mais ne t'en fais pas, je ne leur ai rien dit ! Est-ce que ce serait grave qu'elles sachent ?
Gabriel soupire et semble réfléchir quelques secondes.
– Je suppose que ça ne serait pas un problème qu'elles sachent, dit-il, avant de faire une pause.
Je reste silencieux, attendant patiemment la suite, non sans une certaine appréhension.
– Mais je ne me sens pas vraiment prêt à ce que ça se sache, reprend Gabriel. Les gens sont cons et j'aimerais apprendre à connaître cette partie de moi avant que tout le monde ne soit au courant. Ça m'arrangerait qu'on garde ça secret quelque temps.
Je me contente de hocher la tête. Je m'attendais à cette réponse, même si j'aurais préféré ne pas cacher ma relation à mes amies. J'ignore comment me projeter avec Gabriel. Je sais que tout cela est nouveau pour lui et crains qu'il soit effrayé ou qu'il réalise que, finalement, il ne souhaite pas s'investir au-delà d'un flirt.
Les pensées parasites commencent à refaire surface dans mon esprit et je brûle d'envie de me réfugier dans les bras de Gabriel. Mais quelque chose me retient. Je suis persuadé qu'il me repoussera. Je me contente alors de reprendre timidement mes caresses et sens mon ami bouger près de moi. Lorsque ce dernier rapproche son visage, j'accueille volontiers ses lèvres pour un long baiser. Je pose prudemment mes mains sous le bas du t-shirt de Gabriel, voulant sentir sa peau chaude et réconfortante. Ce dernier laisse échapper un léger gémissement au contact de mon toucher et approfondit le baiser. Alors que nos souffles se mélangent et que nous découvrons peu à peu chacun la peau de l'autre, je sens les battements de mon cœur accélérer. Je pense d'abord que c'est l'excitation qui monte, mais quelque chose me perturbe. J'éprouve de plus en plus de mal à respirer et chaque souffle de Gabriel que je sens sur mon visage me serre un peu plus la poitrine. Lorsque des tâches vertes apparaissent dans ma vision, je ressens quelque chose de familier et de particulièrement désagréable : je suis en train de faire une crise d'angoisse. Pris de panique, je repousse soudainement Gabriel et sors du lit. Je m'emmêle les pieds dans la couette et trébuche. Au sol, je me roule en boule, les larmes aux yeux, me caressant les bras pour tenter de me bercer et de calmer l'angoisse qui monte. Mais rien ne m'aide. J'entends des échos de respirations bruyantes qui parasitent mon esprit et peine à percevoir ce qui m'entoure. Je vois la lumière s'allumer et le visage paniqué de Gabriel surgir dans mon champ de vision. S’il me parle, je n'arrive pas à comprendre ce qu’il me dit, perdu dans les bourdonnements et le bruit de ma propre respiration. Ou est-ce celle de quelqu'un d'autre ? Je ferme les yeux et tente de me concentrer sur la sensation de la main de Gabriel qui est maintenant sur mon épaule. Rapidement, j'ignore comment, je me retrouve adossé au torse de mon ami. Je ressens alors la chaleur rassurante du corps de Gabriel m'envelopper et me contenir. J'essaye de caler ma respiration aux mouvements de sa poitrine contre mon dos et, peu à peu, les bourdonnements cessent. Je reprends progressivement mes esprits, passant mes mains sur mon visage couvert de larmes. L'angoisse laisse alors place à un sentiment de honte. Je n'ai cependant pas le courage de me détacher de l'étreinte de Gabriel qui s'est mis à me bercer doucement.
– Désolé, je murmure.
Gabriel renforce son étreinte.
– Ne t'excuse pas pour ça. Tu vas un peu mieux ?
Je hoche la tête. Je meurs d'envie de me cacher dans un coin et de disparaître.
– Tu as fait une crise d'angoisse non ? demande Gabriel. Tu en fais souvent ?
– Ça m'arrive, de temps en temps. J'aimerais te dire que ça a seulement commencé l'an dernier avec le harcèlement, mais je crois que j'en ai toujours eu. Ça s'est juste aggravé.
Je savoure quelques minutes supplémentaires l'étreinte de Gabriel, puis l'invite à se lever pour retourner nous coucher. Une fois à nouveau dans le noir, je le aisse m'enlacer.
– J'ai fait quelque chose de mal pour que ça se déclenche ? m'interroge-t-il d'un ton inquiet.
– Non, ce n'est vraiment pas de ta faute. Je pense que je ne suis pas prêt à aller plus loin tout de suite, c'est sûrement ça qui m'a fait paniquer.
Gabriel répond en déposant un baiser sur mon crâne.
– Ne te tracasse pas pour ça, me répond-il. Je ne prévoyais pas d'aller plus loin ce soir et je ne ferai rien que tu ne veuilles pas faire aussi.
Je soupire, appréciant pleinement la chaleur du contact de Gabriel contre mon corps.
– Raconte-moi quelque chose sur toi, je lui demande.
Gabriel se lance alors dans un récit narrant la première fois où il est parti en vacances sans ses parents. Je me laisse bercer par les détails qu’il donne du paysage paradisiaque dans lequel il se trouvait, et finis par trouver le sommeil.
8Please respect copyright.PENANA7GYwaBsqUV